Le contrat type général fait peau neuve
Le nouveau contrat type général entrera en vigueur le 1er mai prochain. En exclusivité, voici les principaux changements qui découlent du décret du 31 mars 2017.
Nul texte n’est inoxydable : l’évolution des pratiques, des rapports commerciaux et de la législation, conduisent à les revoir régulièrement sous peine d’obsolescence. L’espérance de vie d’un contrat type étant d’environ sept ans, il s’avère nécessaire de procéder à sa révision après cette échéance.
Faisant office de vaisseau amiral, le « général » vient ainsi de subir son second toilettage. Issu d’un décret du 31 mars (JO du 2 avril), il entrera en vigueur le 1er mai (1). D’ores et déjà, nous attirons l’attention sur deux clauses : les limites d’indemnités qui bondissent et l’introduction d’un préavis en cas de rupture fixé à 6 mois maximum, soit le double de ses frères (sous-traitance, location, commission).
Genèse
Tout commence par la fin de la TRO et, le 30 décembre 1982, la naissance de la loi d’organisation des transports intérieure (LOTI, désormais codifiée). Son article 8 II énumérait les clauses que tout contrat de transport et de location de véhicules avec conducteurs devait contenir : nature et objet du déplacement, modalités d’exécution du service, conditions d’enlèvement et de livraison, obligations respectives des parties, prix du transport et des prestations annexes (le terme était déjà employé). À défaut de convention écrite les reprenant, des contrats types s’appliqueraient de plein droit. Ils devaient être établis par décret (simple) après « avis des organismes professionnels concernés et du conseil national des transports » sous l’égide duquel ils étaient élaborés (2).
Par décision du 12 janvier 1984, le ministre des transports de l’époque (en fait M. Braibant, Conseiller d’État) a mis sur pied un groupe de travail à large spectre présidé par M. Doguet. En sont issus deux contrats types, l’un dit général, applicable aux envois d’au moins 3 t pour lesquels il n’existe pas de contrat type spécifique (3), l’autre consacré à la location. Ils sont nés le 14 mars 1986, date à laquelle la « coordination » était également remaniée. Pour autant, il s’agit de purs textes de droit privé. Depuis, la palette s’est élargie avec des C.T. spécifiques et le « général » a subi une première retouche en 1999 (décret du 6 avril modifié en 2000 et 2001). Il figure à l’annexe II de l’article D. 3222-1 du Code des transports.
Ce qui ne change pas
– le conditionnement/emballage ;
– les rôles au chargement/déchargement ;
– le maintien du droit au prix sous réserve de payer l’indemnité afférente à l’avarie ou à la perte ;
– la modification du contrat ;
– l’empêchement au transport/livraison.
– la réduction du tiers de l’indemnité en cas d’ordre injustifié de destruction ou d’interdiction de sauvetage.
La réserve tenant au dol ou la faute qualifiée allait de soi.
Ce qui change
Article 2 : 4 définitions de plus
▶ le destinataire : partie, désignée par le DO ou son représentant, à qui la livraison est faite avec rappel qu’il est partie d’emblée au contrat de transport.
▶ les « points de proximité » (points relais) : commerce effectuant des prestations de mise à disposition de colis. Elle sert pour la détermination du lieu de déchargement (au seuil du magasin comme pour les commerces sur rue).
▶ la souffrance de la marchandise = cas où personne n’en veut.
▶ les UTI pour économiser un CT conteneurs : conteneurs maritimes, caisses mobiles ou toute autre unité de chargement similaire utilisée en multimodal. Il n’y est fait référence que pour l’immobilisation et l’indemnisation.
Article 3
Inopposabilité des mentions figurant sur les documents étrangers au transport.
Article 5
Responsabilité pour faute prouvée du donneur d’ordre ou du destinataire pour les dommages au véhicule.
Article 6 : emballage
▶ Introduction de réserves de défiance, style CMR. Toutefois, elles n’engagent le donneur d’ordre que s’il les a expressément acceptées sur le document. À défaut, le transporteur peut refuser la prise en charge ;
▶ Rappel que, dans le cadre du contrat de transport, il n’y a ni consignation, ni location, ni fourniture, ni « reprise », ni retour de support. Toute instruction contraire est constitutive d’une prestation annexe spécifiquement rémunérée. La prescription reste annale.
Article 7 : chargement
– Apparition du sanglage.
– Introduction d’une cause supplémentaire d’exonération sous une double preuve : perte ou avarie résultant du chargement effectué par le donneur d’ordre quand le transporteur n’a pu procéder aux vérifications en raison de contraintes imposées sur le site de l’expéditeur (éloignement volontaire du chauffeur, etc.).
– Enfin, par réciprocité, les préposés du donneur d’ordre ou du destinataire qui « donnent la main » agissent pour leur compte et sous leur responsabilité. La situation n’était évoquée que pour les envois de moins de 3 t.
Article 9 : livraison
Traitement des émargés : quand les documents ne sont pas remis au transporteur avant son départ, il y a présomption simple de livraison conforme à condition qu’une confirmation de la remise soit expédiée au plus tard le premier jour ouvrable suivant avant midi.
Article 11 : immobilisation
Introduction du cas des UTI et simplification.
Article 14 : distinction entre retard et défaillance
Dans le second cas, la réparation du préjudice prouvé ne peut excéder le prix de transport.
Article 15 : annulation (nouveau)
À l’image du contrat type « objets indivisibles », on ajoute l’annulation pure et simple du transport. Annoncée moins de 24h avant le jour ou l’heure convenu, elle entraîne la réparation du préjudice (prouvé bien sûr) dans la limite du prix de transport.
Article 17 : empêchement au transport
– simplification ;
– introduction d’un paragraphe sur le traitement des marchandises en souffrance. Procédure à suivre :
– envoi d’un avis de souffrance au donneur d’ordre dans les 5 jours ;
– à défaut d’instructions, mise en demeure de prendre possession ;
– en l’absence de réponse dans les 15 jours, il y a résiliation de plein droit du contrat. La marchandise est considérée comme abandonnée au transporteur (une « res nullius », en somme) qui en devient propriétaire (vente de gré à gré, destruction).
Article 18 : rémunération
– Introduction du coût de la fourniture des cales et sangles dans les prestations annexes à rémunérer.
– Clause de renégociation (y compris en cas de modification des volumes).
Article 19 : modalités de paiement
– Retard de paiement = intérêts égaux à 5 fois le taux légal + les 40 € d’indemnité forfaitaire de recouvrement (comme dans les CT location et commission).
Article 22 : indemnisation pour perte/DV
– Limites :
a) envois égaux ou supérieurs à 3 t : 20 € par kg, 3200 € pour le tonnage transporté ;
b) envois inférieurs à 3 t : 33 € par kg, 1000 € au colis.
NB : la validité de la DV est subordonnée au paiement du prix convenu.. Idem pour la DISL en cas de retard.
La réduction d’un tiers demeure. Il est précisé qu’elle ne s’applique pas en cas de dol ou faute inexcusable. la chose allait de soi. En revanche, les « autres cas », n’ont pu être traités.
Article 23 (nouveau) dommages aux biens de l’expéditeur ou du destinataire
Responsabilité pour faute prouvée mais prescription annale.
Article 24 : délais d’acheminement/retard
Absence d’incidence de l’inobservation des délais même garantis.
L’indemnité reste plafonnée au prix du transport.
Article 25 : introduction de la prescription annale de l’article L. 133-6 du Code de commerce (en raison des prestations annexes et des autres dommages)
Article 26 : Préavis (durée)
– relation de 6 mois maxi = 1 mois ;
– de 6 mois à 1 an = 2 mois ;
– d’1 an à 3 ans : 3 mois ;
– au-delà : 4 mois + une semaine par année complète de relations sans dépasser 6 mois.
(1) Pour les entreprises, les dates d’entrée sont différées.
(2) Après les mésaventures du contrat type sous-traitance, annulé en 2001 parce que deux organisations n’avaient pas été conviées au bal, le texte a été expurgé des « concernés ». Le CNT ayant disparu, c’est désormais le ministère des transports qui pilote leur création.
(3) En 1988, les envois de détail ont fait l’objet d’un contrat type dit « messagerie » qui, en 1999, a été incorporé dans le « général ». C’est pour cela que, sur certains points (rôles au chargement/déchargement, limites d’indemnité), une distinction est faite entre les deux seuils de tonnage : 3 t et plus ou inférieurs. Attention, contrairement à ce que l’on peut parfois lire dans certaines décisions, il s’agit du tonnage de l’envoi (marchandise mise à disposition) et non du véhicule !