La séance de négociation salariale dans le transport routier de marchandises du jeudi 26 mars a abouti à un échec, tout comme la précédente, le 9 février. La réouverture du dialogue social avait été demandée par Alain Vidalies, secrétaire d’Etat au transport au lendemain de l’organisation, le 15 mars, par l’intersyndicale du transport CGT-CFDT-CFTC-CGC-FO, de nouveaux barrages routiers.
La négociation a achoppé pour les mêmes motifs qu’il y a un mois et demi, même si les bases de départ avaient un peu changé. L’intersyndicale, qui demandait jusqu’à présent une hausse de 5 % des minima de branche, a abaissé ses exigences, à 4 %. Mais la partie patronale a jugé ce niveau tout aussi « inatteignable » que le précédent.
Les organisations d’employeurs (FNTR, TLF et Unostra) n’avaient, elles, pas modifié leur proposition, soit une augmentation allant de 1 %, pour le coefficient le plus élevé, à 2 %. Inacceptable pour les syndicats.
Aucune augmentation conventionnelle depuis 2012
Le patronat proposait aussi l’ouverture de nouveaux chantiers de négociations, telle qu’une réduction du délai de carence des arrêts maladie. Mais les syndicats veulent tout d’abord régler la question salariale pour en finir avec « la smicardisation de la profession », disent-ils. Depuis 2012, aucune augmentation conventionnelle n’a été appliquée faute d’accord. Si bien qu’actuellement, quatre grilles sur cinq démarrent au-dessous du smic.
De son côté, la fédération patronale des PME (OTRE) a avancé des propositions nouvelles. A une hausse initiale, entre 1,4 % et 2,2 % selon les coefficients, s’ajouterait « une seconde augmentation entre 0,4 % et 0,6 % au 1er octobre », si l’amendement de lutte contre le dumping social de la loi Macron, prévoyant que les chauffeurs routiers étrangers travaillant dans l’Hexagone soient payés au smic français, rentrait en application, a indiqué Jérôme Vérité, de la CGT Transports.
Routiers mobilisés pour leurs salaires: les opérations escargots ont repris
Les routiers ont relancé lundi leur mouvement de grève, interrompu en février, en menant des opérations escargots dans 27 lieux de France. Ils espèrent une reprise des discussions avec le patronat afin d’obtenir de meilleurs salaires. A Moissy-Cramayel en Seine-et-Marne, les automobilistes sont parfois restés bloqués durant plusieurs heures sur l’autoroute A84.
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« Irrecevable, pour Thierry Douine, président de la fédération des transports CFTC. Je ne vais pas signer un accord conditionné au vote d’une loi ! » Une proposition, qui « n’a aucun sens », abonde Nicolas Paulissen, délégué général de la Fédération nationale des transports routiers (FNTR).
Salle envahie
« C’est terminé, on n’aura rien en 2015, et en 2016, avec l’augmentation du smic, la grille va encore se tasser en dessous », déplore M. Douine. Pour lui, « les salariés ne se sont pas assez bougés » lors des multiples actions (barrages et opérations escargot), qui ont lieu depuis janvier, et « les patrons n’ont pas senti de pression ».
Jeudi, certains routiers ont envahi la salle de la Direction régionale du travail et de l’emploi (Direccte) d’Ile-de-France, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), où se tenait la négociation. « Environ 200 militants ont pénétré dans la salle, ont voulu séquestrer les patrons, cela a duré deux heures », indique M. Douine.
« Je condamne ces débordements syndicaux », indique M. Paulissen, pour qui cette action « n’est pas spontanée ». « On avait appelé à une manifestation devant les locaux de la Direccte. Après des interruptions de séances, des salariés en colère ont envahi la salle. Ils étaient énervés, raconte M. Douine. Mais c’est logique : ils font face au dogmatisme profond des patrons qui ont pourtant la capacité de faire décoller les grilles du smic. On a essayé de dire à nos militants qu’il valait mieux nous laisser faire et ils sont partis. »
Francine Aizicovici
Journaliste au Monde